31 août 2011

La reine Elisabeth et l'égyptologie



Une du Soir Illustré ( 8 mars 1930)
La jeune Elisabeth von Wittelsbach, duchesse en Bavière, se rend en Égypte pour la première fois au cours d'un voyage de l'impératrice Elisabeth d'Autriche, sa tante et marraine, autour de la Méditerranée. Ce n'est que quelques années plus tard, en tant que reine des Belges, qu'elle voue une vraie passion à ce pays et son antique civilisation.

Le début du XXe siècle est marqué par l'orientalisme, à la mode chez les artistes, écrivains et poètes, et gagne également les hautes personnalités. Mais un autre événement passionne la reine : la découverte, le 4 novembre 1922, de la tombe de Toutânkhamon, onzième pharaon de la XVIIIe dynastie. Les fouilles, commandées par Lord Carnarvon (1866-1923), sont effectuées par l'archéologue et égyptologue britannique Howard Carter (1874-1939). Par ailleurs, la reine avait eu l'occasion de visiter une exposition à l'occasion du centenaire du déchiffrage des hiéroglyphes par Champollion.

Elisabeth et Jean Capart quittant le Winter Palace de Louxor (© Le Soir Illustré du 8 mars 1930)

Elisabeth est alors mise au courant de cette découverte via un article paru dans "Le Flambeau", signé par l'égyptologue belge Jean Capart (1877-1947). Elle démontre très vite son souhait d'assister à l'ouverture officielle de la troisième chambre du tombeau. Semble-t-il par l'intercession des autorités égyptiennes, Carter et Carnarvon cessent les travaux en attente de la venue de la reine : l'ouverture est prévue le 17 février. Partie de Bruxelles, le 9 février 1923, en compagnie de son fils aîné, le prince Léopold, et de Jean Capart, elle arrive à Alexandrie six jours plus tard. Elle passe par Le Caire et Thèbes, mais, pour une raison encore inconnue aujourd'hui, elle n'assiste pas à l'ouverture le 17 février... Le lendemain, elle se rend tout de même dans le tombeau. Elle pose beaucoup de questions, mais selon l'avis de Carter, elle se mêle un peu trop des recherches et perturbe le bon déroulement des opérations. Le biographe de l'archéologue britannique indiquera par ailleurs : "Les personnages royaux n'ont pas beaucoup de compréhension pour les gens ordinaires". La reine, elle, semble conquise : elle visite trois fois le site, dans la Vallée des Rois, et se verra offrir un fragment englué d'huile qui protégeait le tombeau qu'elle remettra aux Musées d'Art et d'Histoire du Cinquantenaire.

Arrivée de la reine et de sa suite au lieu de la tombe du pharaon Toutânkhamon, en compagnie de Lord Carnarvon (© Le Soir Illustré du 8 mars 1930)

La reine reçoit les explications de Jean Capart avant de pénétrer dans le tombeau. Le prince Léopold, lui, s'entretient avec Lors Carnarvon (© Le Soir Illustré du 8 mars 1930)
Profitant de cette visite qu'il a réalisé en compagnie de la reine et du visible enthousiasme de celle-ci, Jean Capart décide de créer une fondation. La Cour donne l'autorisation, le 21 septembre 1923, afin qu'elle soit nommée Fondation Égyptologique Reine Elisabeth. Cette fondation veut promouvoir les études égyptologiques et papyrologiques en Belgique et soutiendra l'obtention d'une concession de fouilles à El Kab, finalement obtenue par la Belgique en 1936. En 1925, Capart lance également une revue, Chronique d’Égypte tandis que les Éditions de la Fondation Égyptologique Reine Elisabeth publie chaque année diverses publications scientifiques.

Message de condoléances de la Fondation suite au décès du roi Albert Ier (© Collection personnelle)

En 1930, la reine entreprend un nouveau voyage en Egypte, mais cette fois-ci, accompagnée du roi Albert Ier. Les souverains embarquent à Gênes, après s'être entretenu avec le prince Umberto et la princesse Marie-Josée de Savoie, à bord du S.S. "Esperia" en direction d'Alexandrie. Le couple visite tout d'abord le site des pyramides et du Sphinx ainsi que les nouvelles fouilles ayant cours sur ce même site : la mise à jour de la nécropole de Ra-Ouer, grand prêtre de la déesse Nakb. 


Arrivée du couple royal sur le site de Gizeh (© Le Soir Illustré du 22 mars 1930)

Le roi et la reine arrivent sur le site des nouvelles fouilles archéologiques (© Le Soir du 22 mars 1930)

Le couple visite également la tombe du pharaon Ramsès Ier, mais la reine Elisabeth s'adonna à de nombreuses autres visites, seule, tandis que le roi Albert Ier honora de sa présence d'autres activités notamment avec le roi Fouad d’Égypte sans rapport avec la civilisation pharaonique. A bord d'un yacht royal, la reine remonte la Haute Égypte vers Assouan. Elle se rend au temple de Karnak, sur le site de Louxor qu'elle avait déjà visité en 1926, le temple de Deir-el-Bahari ou encore Medinet Habou. Elisabeth eu également l'occasion de remettre au roi Fouad un ouvrage sur Memphis écrit par Jean Capart.

Les souverains sortant de la tombe de Ramsès Ier (© Le Soir Illustré du 5 avril 1930)

© Une du Soir Illustré du 5 avril 1930

A Karnark, accompagnée de la comtesse de Caraman-Chimay, dame d'honneur de la reine, du Jean Capart, de Sader Wahna Pacha et de M. Nolf (© Le Soir Illustré du 5 avril 1930)



La reine et Paul Hymans, ministre belge des Affaires étrangères à Karnak (© Le Soir Illustré du 5 avril 1930)

La reine est hissée sur une chaise à poulie afin de mieux admirer le sommet d'un pylône du temple de Louxor (© Le Soir Illustré du 5 avril 1930)

Statuette offerte à la reine Elisabeth lors de son passage à Louxor par Sir Robert Mond, président de l'Egyptian Exploration Society. Celle-ci, en schiste, est censée représenter la reine Hatchepsout. Elle a ensuite été remise aux Musées Royaux d'Art et d'Histoire. (© Le Soir Illustré du 17 mai 1930)

La reine pose entre Ramsès III et le dieu Thot à Medinet Habou (© Le Soir Illustré du 5 avril 1930)


Le roi et la reine se rendent encore en Égypte en 1931 dans le cadre d'un voyage privé avec la sœur d’Élisabeth, Sophie (1875-1957), veuve du comte de Toering-Jettenbach. L'année suivante, elle inaugure une exposition consacrée à la reconstitution des ateliers de Thoutmès, sculpteur du pharaon Akhenaton et de son épouse Néfertiti. 

Logo de l'Association Égyptologique Reine Elisabeth
Pour consulter son site Internet : ici

Aujourd'hui, la Fondation existe toujours. Depuis plusieurs années, elle est devenue une a.s.b.l. et porte désormais le nom d'Association Égyptologique Reine Elisabeth et est toujours hébergée par les Musées Royaux d'Art et d'Histoire. L'actuel président du conseil d'administration est le comte Arnould d'Arschot Schoonhoven. La revue Chronique d’Égypte existe toujours ainsi que les nombreuses publications scientifiques qui paraissent chaque année. L'association organise des cycles de conférences aux Musées Royaux annuellement et possède une bibliothèque égyptologique et papyrologique considérée comme l'une des plus riche au monde.

Diverses personnes au sein de la famille royale ont, depuis lors, eu l'occasion de visiter différentes lieux d’Égypte, notamment le riche musée du Caire. La princesse Mathilde est par ailleurs très attirée par cette civilisation et a visité, il y a peu, l'exposition se tenant à Bruxelles et mettant en scène la découverte du tombeau de Toutânkhamon et son fabuleux trésor.

5 commentaires:

  1. Quel excellent article Valentin !

    Tu nous offres là un reportage complet, érudit et richement illustré, mille mercis.

    Pour justifier son absence lors de l'ouverture de la troisième chambre funéraire, elle aurait invoqué une maladie, mais d'aucuns prétendent qu'elle craignait une malédiction ...

    Ah j'espère que les examens se passent bien.

    Amicalement,

    Damien

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  2. Je ne vais pas être très original par rapport au commentaire de DamienB : c'est un article très intéressant et bien documenté sur un sujet dont on parle peu. Il me semble que la reine Fabiola avait accordé son Haut Patronage à la Fondation Egyptologique Reine Elisabeth ; j'ignore si c'est toujours le cas. Il est dommage que le site officiel du Palais ne parle pas de cette fondation égyptologique dans la rubrique "Initiatives royales"... Par ailleurs, je conseille à tous la visite de l'exposition sur Toutankhamon qui se déroule actuellement au palais du Heysel.

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  3. Merci et felicitations pour cet article,mais je me demande quelles etudes vous faites,peut-etre des etudes sur les tetes couronnees?
    Elisabeth est une reine qui me fascine ,comme sa tante Sissi!
    Bonne chance aux examens!
    A plus!

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  4. Damien B., encore merci pour tes encouragements. J'ai terminé mes examens lundi et ceux-ci se sont plus ou moins bien passés. J'attends les résultats pour le 5 septembre.

    Serar, je suis en première année de sciences politiques à l'université (si tout va bien, je rentrerais bientôt en deuxième année). Mais j'ai toujours été passionné par l'Histoire et en particulier lorsque cela touche aux familles royales.

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  5. Eh bien croisons les doigts pour lundi :)

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